03/12/2021

Give some Pink to SEvrIeN

Je m’appelle Sevrien et j’ai 37 ans. Depuis 16 ans, je travaille comme jobcoach dans une ASBL namuroise. J’aide des gens à trouver du travail. Pendant toutes ces années, j’ai écouté des personnes m’expliquer les situations difficiles qu’elles traversaient. Ces personnes avaient besoin de soutien et je leur ai apporté toute l’aide que je pouvais leur donner. Jamais, je n’ai pensé qu’un jour ce serait moi qui me retrouverais dans une position où j’aurais besoin de demander de l’aide à d’autres pour rallumer la flamme de l’espoir. Sauf que mon combat est celui de Sevrien contre la maladie. Le cancer est une maladie insidieuse qui débarque un jour dans votre vie et la chamboule à tel point que vous devez vous accrocher à toutes les possibilités si vous voulez voir grandir votre petite fille et continuer à l’élever avec son papa.

Un combat à armes PAS égales

Un jour d’octobre 2020, je sens une boule sous mon aisselle. Je prends rendez-vous directement chez mon médecin. À partir de là, les choses s’enchainent très rapidement. Cette première consultation n’augure rien de bon. Ce rendez-vous est le premier d’une longue et triste série qui ne semble pas vouloir s’arrêter. Rapidement le diagnostic tombe. C’est un cancer du sein triple négatif, un CST. Cette variante du cancer du sein qui décime principalement les femmes en dessous de 40 ans et qui est hyper agressive. Au départ, je pense comme tout le monde que le cancer du sein est celui dont on guérit le mieux. Et, tout mon entourage en est persuadé et me dit que, même si c’est une catastrophe, j’ai été prise en charge rapidement et que je vais m’en sortir. Mais pas du tout, les chances de se remettre d’un CST sont infimes. Et les médecins sont clairs : « Madame, vous avez peu de chances de voir grandir Emy ». C’est le coup de massue, je ne peux pas admettre ça. Je ne peux pas abandonner Emy. Je veux pouvoir être là pour elle et pour Boris, mon amour qui est à mes côtés depuis presque 20 ans. 

Je veux pouvoir être là pour Emy et pour Boris, mon amour qui est à mes côtés depuis presque 20 ans. 

Je décide de faire confiance aux médecins et tente de me convaincre que je vais m’en sortir. D’autant qu’autour de moi, c’est une armada qui me soutient au quotidien : famille, amis, collègues de travail et des cours de zumba… Les marques de soutien arrivent de partout. Ça non plus, je ne pensais pas que c’était possible. À aucun moment, l’intensité de ces témoignages ne faiblit. Incroyable, inimaginable. La créativité de cet entourage est sans limite et me porte quotidiennement. À chaque étape, chaque rendez-vous, chaque échéance, cette armada est présente. Vidéos, messages, cartes, cadeaux, témoignages… C’est la boutique Zalando du soutien, il y en a pour tous les goûts. Je suis gâtée et entourée. Ils n’hésitent pas à se mettre en scène et n’ont pas peur du ridicule. Le ridicule, lui au moins, ne tue pas. Ils veulent me changer les idées, me faire rire et ils y arrivent. Les chimios sont lourdes, me fatiguent beaucoup et me rendent malade. Le goût que ces traitements me laissent en bouche me dégoûte. Chaque fois que j’y retourne, tout mon corps se crispe et redoute le moment où ce mauvais goût reviendra me coller la nausée. D’autant qu’après chaque séance, je suis lessivée, épuisée et j’ai du mal à me remettre. Pourtant, je continue à espérer, j’y crois fermement surtout que l’énergie positive qui m’entoure me transporte et m’empêche de renoncer. 

L'énergie positive qui m'entoure me transporte et m'empêche de renoncer.

En juin, le verdict tombe, un verdict sombre. Malgré les chimios très lourdes, les traitements qui m’affaiblissent et toutes les choses auxquelles j’ai dû renoncer, le cancer a progressé.  J’ai des métastases sur les os. Les médecins tentent une autre approche et je continue d’y croire toujours portée par cette armada incroyable et ma volonté de fer. Je ne baisse pas les bras. Je me remets en selle. Après avoir vidé mon stock de larmes, passé des heures à me demander pourquoi moi, pourquoi cette saleté de maladie et à me répéter que ce n’est pas juste, je reprends les armes.  Il y a encore d’autres échéances, d’autres traitements et des thérapies à explorer, peut-être en Allemagne, mais c’est hors de prix.  Mon armada me rebooste en soulignant ma combativité. Je continue d’y croire encore et encore.

En septembre, les nouveaux résultats augurent du pire. Les métastases ont continué de s’étendre. Je m’effondre, je désespère, je suis tentée de renoncer et n’y crois plus. Je passe par tous les stades ; la rage, la haine, la colère, le désarroi, la tristesse, l’incompréhension, l’injustice, l’envie de m’enfermer et de me laisser mourir. Je ne vois plus d’issue même s’il reste encore des pistes à explorer, mais elles sont impayables. Mon revenu est celui de l’assurance maladie et Boris qui me soutient sans faille depuis le début a un revenu de conjoint aidant. Où voulez-vous que j’aille trouver les montants astronomiques (au minimum 200.000€) me permettant de tenter le traitement peut-être prometteur proposé en Allemagne ?

Give some Pink to SEvrIeN

Mes ressources et ma combativité faiblissent, mais j’ai sous-estimé mon armada, sa capacité à refuser l’inacceptable et toutes les ressources dont elle est capable. En un week-end, la communication de Give some Pink to SEvrIeN est créée et mise en avant sur les réseaux sociaux. La collecte de fonds pour m’aider à accéder aux traitements couteux est lancée. Le site est également mis en ligne. Partout des actions voient le jour pour venir grossir la récolte de fonds. Les soutiens financiers, les messages d’encouragement, les témoignages arrivent de toutes parts. Que d’émotions. Les initiatives arrivent des deux côtés de la frontière linguistique. Si je travaille en Wallonie, mes racines sont flamandes et c’est en Flandre que je vis. 

La rage, la colère, la tristesse et l’incompréhension laissent place à la foi engendrée par cette vague de générosité incroyable. À nouveau, je retrouve l’énergie pour investiguer d’autres pistes. Il y a le fameux Trodelvy®, un médicament inaccessible en Belgique, mais disponible en France sous certaines conditions. Là aussi, c’est une piste qui finit dans une impasse. L’accès au Trodelvy® en France finit par m’être refusé. Il n’y en a déjà pas assez pour les triplettes françaises. Il faut que la firme qui le commercialise puisse optimiser la production. Il reste le traitement proposé par l’Allemagne, mais il faut rassembler des sous, beaucoup de sous. Je suis également suivie par un nouvel oncologue qui me propose une autre chimiothérapie. 

Aujourd’hui, j’arrive donc au moment le plus difficile. Celui du choix ; m’arrêter là, renoncer parce que j’ai épuisé toutes mes ressources et attendre la mort. Ou décider de continuer, de garder le sourire et l’espoir pour Emy et Boris et reprendre le combat alors que mon corps me lâche. Je ne veux pas les abandonner. Je me retrouve face à moi-même et à mes doutes, mais aussi face à toutes les personnes qui ont remué ciel et terre et dont l’investissement pour m’aider n’a jamais faibli. Il y a aussi toutes ces personnes que je remercie tant et qui ont contribué en fonction de leurs moyens, car chaque don compte, à faire grimper la récolte de fonds organisée sur Gofundme. Alors je me dis que je n’ai pas le droit d’abandonner. Je dois continuer, je dois trouver l’énergie, garder l’espoir et reprendre le combat. 

À la peur de mourir et d’abandonner les miens s’ajoute celle d’entamer un traitement qui pourrait prolonger le temps que je pourrais passer avec eux, mais qui risque de devoir s’arrêter à cause de la réalité financière. La récolte de fonds a déjà atteint 62.000€. Cette générosité est tellement incroyable et inimaginable que j’en ai le tournis. Mais c’est horrible, car ça ne suffit pas. Il en faut plus pour faire le traitement en Allemagne et il faut que je tende la main. Pour moi qui ai toujours eu du mal à demander de l’aide, c’est difficile. Pourtant, si 150.000 personnes donnaient 1€, ce serait réglé. 

Demain est un autre jour rempli d'espoir… je me marie ! 

Et puis dans tout ça, il y a encore cette prochaine date, ce prochain rendez-vous que je ne veux manquer pour rien au monde. Le 4 décembre, je me marie. Boris m’a fait sa demande. Depuis presque un an, son amour et son soutien inconditionnels n’ont pas faibli et se renforcent chaque jour d’avantage. Je veux que ce moment soit magique et rempli d’espoir. Je veux voir l’émotion dans les yeux de mes parents qui sont si fiers de moi et celle de ma proche famille. Et enfin je veux que ma petite Emy habillée en Reine des Neiges, mais rose, c’est son choix, soit la demoiselle d’honneur la plus heureuse du monde. Partager mon histoire et me dévoiler de la sorte n’est pas évident, mais pour retrouver l’espoir, j’ai besoin de faire cet appel à la générosité et à la solidarité. 

J’espère également que toutes les démarches que je mène depuis des mois, notamment pour l’accès au Trodelvy® en Belgique serviront à toutes celles qui comme moi mènent un combat acharné. Renoncer ne devrait pas être une option dictée par l’argent. Je remercie toutes les personnes qui liront et partageront mon histoire et me permettront de suivre le traitement en Allemagne.

Sevrien

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